Biogen a annoncé les premiers résultats de son étude pivot de phase 3 VALOR sur le tofersen (BIIB067), un oligonucléotide antisens expérimental (ASO) en cours d'évaluation pour les personnes atteintes de sclérose latérale amyotrophique (SLA) et porteuse d'une mutation sur le gène SOD1.
Les résultats sont déprimants.
L'étude VALOR a montré qu'il n'y avait aucun ralentissement de la progression de la maladie, tel que la mesure le score global de l'échelle ALSFRS-R.
Cependant des améliorations sont apparues sur des points particuliers ou des aspects techniques.
En particulier la thérapie a bien atteint son but technique, même si cela ne se traduit pas en terme cliniques. La production de protéine SOD1 a bien été réduite, des différences ont été observées entre les groupes Tofersen et placebo de 38 % et 26 % dans les populations à progression plus rapide et plus lente respectivement.
En ce qui concerne la valeur initiale de la chaîne légère des neurofilaments plasmatiques (NfL), un marqueur potentiel de dégénérescence neuronale, des différences ont été observées entre les groupes tofersen et placebo de 67 % et de 48 % dans les populations à progression plus rapide et plus lente respectivement.
Dans la population qui progresse le plus rapidement, la fonction respiratoire a évoluée un peu moins vite que prévu (SVC) ; différence de 7,9 %). C'est aussi le cas pour la force musculaire.
Des événements neurologiques graves ont cependant été rapportés chez un patient sur vingt recevant du Tofersen, dont 2 cas de myélite (2,0 %). Un décès a été signalé dans le groupe traité au Tofersen dans l'étude VALOR, qui a été déterminé comme n'étant pas lié au Tofersen.
Tofersen se lie à l'ARNm de SOD1, permettant sa dégradation par la RNase-H1 pour réduire la synthèse de la production de protéines SOD1 mutantes.
L'idée qu'il faille réduire la production d'un gène muté est très courante chez les biologistes, elle est cependant contre-intuitive sur le plan médical. En effet nos gènes n'auraient pas été sélectionnés s'ils étaient inutiles, et qu'on pouvait les mettre "KO" sans conséquences graves. SOD1 est un gène qui est indispensable à la survie. Il est présent dans la plupart des organismes.
Par ailleurs, un ASO n'est efficace que pour un certain type de mutation, or il y a plus d'une centaine de mutations connues pour SOD1, certaines à progression très rapide, d'autres au contraire quasi inoffensives.
Si le problème était dû à un "gain de fonction" de la protéine mutée, alors il ne suffisait pas de réduire sa production, il fallait la corriger, ou augmenter la production de SOD2.
Tofersen est également à l'étude dans l'étude de phase 3 ATLAS, qui est conçue pour évaluer la capacité de Tofersen à retarder l'apparition clinique lorsqu'elle est initiée chez des individus présymptomatiques présentant une mutation génétique SOD1 et des preuves biomarqueurs de l'activité de la maladie.
Espérons que cet échec va déclencher une réflexion stratégique globale chez Biogen qui a déjà arrêté toute recherche sur la SLA en général, pour ce concentrer sur des segments jugés (à l'époque) moins risqués à travers des licenses avec Ionis Pharmaceuticals.
Cet échec n'est pas seulement celui d'une thérapie de la SLA, c'est globalement l'échec d'une recherche sur les maladies neurodégénérative qui est incapable de produire des résultats malgré des investissements colossaux (plus de 500 essais cliniques infructueux pour la SLA, près de 2500 essais cliniques infructueux pour Alzheimer). Les chiffres sont vertigineux et insensés, un sorcier Vaudou aurait statistiquement de meilleurs résultats.
Il est temps d'arrêter de recruter des "meilleurs élèves" ou des leaders d'opinion comme scientifiques, la société a besoin de personnes innovantes pas de scientifiques courants après leur carrière ou les plateaux de télévision.