Depuis les années 90' et avec la publicité énorme accordée aux travaux de séquençage du génome humain, l'idée que les thérapies géniques seraient une sorte de méthode universelle et extrêmement efficace pour guérir les maladies non-communicables, c'est à dire les maladies sur lesquelles on a peu de moyen d'action.
Kymriah (Chimeric antigen receptor T cell Therapy) de Novartis a été la première thérapie génique approuvée par la FDA à entrer sur le marché. Depuis lors, des médicaments tels que le Zolgensma de Novartis ont également reçu l'approbation de la FDA, mais dans l'ensemble peu de thérapies géniques ont reçues une autorisation de mise sur le marché. La complexité de telles thérapies est sans doute un facteur explicatif dans cette pénurie. How ASOs work in the human body. Image by Larissa Nitschke
Depuis de nouvelles formes de thérapies géniques sont apparues. Par exemple la thérapie antisens est une forme de traitement qui utilise des oligonucléotides antisens (ASO) pour cibler l'ARN messager (ARNm). Généralement fabriqué en laboratoire par synthèse chimique en phase solide, ils peuvent être produits par des chaînes de production pharmaceutique traditionnelles.
L'amyotrophie spinale (SMA) est une maladie neurodégénérative génétique, causée par une délétion ou une mutation homozygote du gène du motoneurone de survie1 (SMN1), affectant les motoneurones inférieurs (LMN). Les nombreux types de SMA, et donc la gravité de la maladie, s'expliquent en grande partie par le nombre de copies du gène SMN2, qui est également capable de produire une petite quantité de protéine SMN.
Il en résulte une paralysie progressive, affectant d'abord les membres inférieurs puis les membres supérieurs, suivie d'une insuffisance respiratoire, d'une dysarthrie et d'une dysphagie.
Les enfants atteints de SMA sont généralement classés suivant l'âge d'apparition des symptômes et le jalon moteur acquis le plus élevé, alors que les patients adultes atteints de SMA sont classés fonctionnellement en "non-sitters", "sitters" et "walkers". C'est à dire alité, capable de s'assoir, et capable de mobilité (réduite).
Nusinersen, un oligonucléotide antisens, a été approuvé pour le traitement de la SMA après avoir démontré qu'il a été démontré dans deux essais cliniques randomisés contrôlés par placebo, qu'il améliore la survie et la fonction motrice chez les nourrissons et les enfants.
L'amyotrophie spinale est causée par des mutations de perte de fonction dans le gène SMN1 qui code pour la protéine du motoneurone de survie (SMN). Les patients survivent grâce à de faibles quantités de protéine SMN produite à partir du gène SMN2. Nusinersen module l'épissage alternatif du gène SMN2, le convertissant fonctionnellement en gène SMN1, augmentant ainsi le niveau de protéine SMN dans le SNC.
Nusinersen a aussi été associé à de nombreux effets secondaires, dont certains inquétants.
Depuis l'approbation du Nusinersen pour le traitement des patients atteints d'amyotrophie spinale, il a été largement utilisé dans la population adulte, malgré l'absence d'essais cliniques évaluant son efficacité et sa sécurité dans ce sous-groupe de patients.
Les patients adultes atteints de SMA sont caractérisés par une énorme hétérogénéité clinique et une histoire médicale mal connue. Aussi l'efficacité du Nusinersen n'est basées que sur de petites séries de cas, avec des résultats controversés. Il a, par exemple, été affirmé que les légères améliorations observées dans la population adulte atteints de SMA après le traitement au Nusinersen pourraient être uniquement dues à l'effet placebo.
Des études antérieures ont montré que des améliorations individuelles spontanées de certaines échelles motrices sur une période inférieure à deux ans ne sont pas rares dans la population adulte atteinte de SMA, ce qui fausse les conclusions des études cliniques.
De plus, ces dernières années, des traitements tels que le salbutamol ou la pyridostigmine sont fréquemment utilisés pour le traitement des patients atteints de SMA et ces traitements pourraient avoir un effet positif sur les échelles motrices, qui serait alors attribué à tort à l'utilisation du Nusinersen.
Compte tenu de la fréquence élevée des événements indésirables associés aux ponctions lombaires répétées et aussi des coûts élevés du traitement, l'objectif d'une nouvelle étude était d'étudier l'intérêt de Nusinersen dans une cohorte espagnole multicentrique de patients adultes atteints de SMA traités et non traités. Il faut cependant noter que les auteurs de cette sont liés à Biogen. Nusinersen est un concurrent de la thérapie génique Zolgensma, développé par la société AveXis (dirigée à l'époque par Brian Kaspar) qui a été racheté par la société Novartis. Zolgensma est communément vu comme une excellente thérapie.
Cette étude multicentrique a utilisé un groupe témoin avec des données d'histoire médicale pour disposer d'une comparaison directe et, un pourcentage similaire de patients ont été traités avec du salbutamol à la fois dans le groupe témoin et le groupe Nusinersen.
Globalement, l'effet du traitement sur les échelles motrices, semble cependant modeste, et en ligne avec les études précédentes. Après 6 mois de traitement, les patients traités ont montré une amélioration de 2 points du Revised Upper Limb Module (RULM) par rapport aux patients non traités. Les mesures de résultats applicables à tous les sous-groupes fonctionnels (RULM, ALSFRS-R et %FVC) n'ont pas montré d'améliorations statistiquement significatives.
Un âge de traitement plus jeune (qui chez les enfants est étroitement lié à une durée de maladie plus courte), une meilleure fonctionnalité de base et plus de copies SMN2 ont été associés à une meilleure réponse au traitement dans ces essais.
Les non-sitters sont évidemment moins susceptibles de répondre au traitement, tandis que l'âge, la durée de la maladie et le nombre de copies SMN2 ne semblaient pas influencer la réponse au traitement. Il semble étonnant que le nombre de copies SMN2 n'influence pas la réponse au traitement, car c'est sensé être le mécanisme par lequel Nusinersen opère.
Bien que l'effet placebo puisse en effet expliquer certaines améliorations, des éléments soutiennent également un effet physiologique du Nusinersen. Premièrement, contrairement à ce que l'on pourrait attendre d'un effet placebo, l'amélioration des patients augmentait avec le temps de traitement. Deuxièmement, quelques patients ont connu d'énormes améliorations.
Néanmoins, au moment de décider de commencer un traitement, les auteurs rapportent que le bénéfice potentiel doit être mis en balance avec les risques et les coûts du traitement qui est de nature invasive.
Le traitement au Nusinersen chez les patients adultes atteints de SMA est en effet associé à une fréquence élevée (30 à 80 %) d'événements indésirables.
Si la plupart de ces événements indésirables sont bénins et transitoires, certains d'entre eux sont permanents et peuvent mettre la vie en danger (méningite, hémorragie sous-arachnoïdienne).
La plupart des événements indésirables sont liés à la procédure d'administration et pourraient être plus fréquents et plus graves chez les patients présentant des épines dorsales complexes. L'utilisation d'aiguilles non traumatiques et d'approches guidées par échographie pourrait aider à réduire la fréquence et la gravité des événements indésirables.
Les études effectuées jusqu'ici suggèrent qu'une thérapie Nusinersen est peu susceptible d'améliorer l'état de la plupart des patients alités (non-sitters). Par conséquent, l'utilisation de Nusinersen chez ces patients doit être évaluée avec soin, en particulier compte tenu de la disponibilité d'alternatives orales.
En conclusion, cette étude multicentrique montre d'après ses auteurs, que le traitement au Nusinersen est associé à de légères améliorations motrices et fonctionnelles chez plus de la moitié des patients adultes atteints de SMA, mais qu'il provoque également des événements indésirables fréquents. Il convient cependant que les auteurs de cette étude ont été largement impliqués dans la commercialisation de Nursinersen.